lundi 10 mars 2008

echec multi-culturel en Malaisie

"Ce qui se voulait un modèle - énergique mais réussi au plan économique - d'intégration ethnique et culturelle entre Malais, Chinois, Indiens, musulmans, bouddhistes, hindouistes et chrétiens, a vécu en Malaisie. Aux commandes depuis la fin de l'ère coloniale britannique en 1957, la coalition de gouvernement du Barisan Nasional (Front national) rassemblant 14 formations politiques emmenées par l'Organisation nationale pour l'unité malaise (UMNO) a subi, le 8 mars, une cinglante défaite électorale.

Le Barisan Nasional (BN) n'a remporté que 140 des 222 sièges du Parlement, laissant filer la majorité des deux tiers qui lui garantissait la faculté d'amender la Constitution selon les besoins du moment. S'il conserve le pouvoir, le BN se voit dorénavant privé de son autorité historique sur un pays au PIB se rapprochant des pays développés (5 000 dollars par habitant et par an).
La seule déroute équivalente qu'il ait essuyée dans le passé, en 1969, avait été suivie d'émeutes antichinoises dans un climat de ressentiment à coloration socio-économique de la part de la majorité ethnique malaise de la Fédération.
Les leaders de la coalition se sont rendus, dimanche, au domicile officiel du premier ministre sortant, Abdullah Ahmad Badawi, en fonctions depuis 2003, pour lui exprimer leur soutien ; le chef du gouvernement devrait être reconduit dès lundi pour un mandat désormais mal défini tant est appuyé le désaveu de l'électorat. Il a feint de ne ressentir "aucune pression pour démissionner". A quoi son ancien mentor, l'ex-premier ministre Mahathir Mohammad, qui l'accable de sarcasmes depuis des mois pour son indécision, a rétorqué que le "pays multiracial a désormais un gouvernement faible qui aura du mal à conduire les affaires".
Le BN doit sa punition électorale à plusieurs facteurs : les mécontentements des minorités ethniques envers une "discrimination positive" en faveur des Malais inscrite dans le système administratif, scolaire, social et financier, et un mécontentement économique des Malais eux-mêmes, résultant d'un tassement de la croissance. Les résultats des élections locales parallèles de samedi se traduisent, pour lui, par la perte de contrôle, sans précédent, de cinq des douze Etats péninsulaires de la Fédération, dont l'île de Penang, à majorité chinoise, vitrine high-tech du pays.
Un ex-dauphin de Mahathir tombé en disgrâce et passé à l'opposition, Anwar Ibrahim, sort gagnant de ce scrutin où des mesures de justice l'empêchaient de concourir. "Un jour nouveau se lève sur la Malaisie", a-t-il répété aux médias en assurant que son Parti de la justice oeuvrerait en faveur des Malais, des Chinois et des Indiens "de façon équitable".
En l'absence d'observateurs internationaux, les accusations de M. Ibrahim quant à des fraudes de grande ampleur de la part du pouvoir ne semblent pas emporter une large adhésion dans l'opinion. Mais le précédent de 1969 et les lois drastiques dans lesquelles la Malaisie a été tenue depuis lors, contrastant avec la richesse d'une grande partie de la société, laissent craindre des tensions pour les mois qui viennent. "

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